le doxaphobe

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psychologie


A la recherche du paradis perdu

 

 

 

Attention, tous les propos ci-dessous sont formulés à partir de théories et non de faits scientifiques, il s’agit plus de pistes de réflexions que de vérités.

 


            Le terme "paradis perdu" désigne la réalité fantasmée de la vie intra-utérine dont chacun de nous a été chassé. Les théories faisant mention de cette notion, de celles de Freud à celles de Dali, considèrent toutes le retour au paradis perdu comme un désir caché au plus profond de notre inconscient. Ce besoin serait à l’origine de bon nombre d’éléments disséminés dans notre vie quotidienne : ce serait l’exemple de la position fœtale, automatisme de défense.

 


             Pour Freud le processus de regressus ad uterum est un fantasme irréalisable. Le retour dans ce qu’il formule, merveilleusement, comme «l’antique patrie des enfants et des Hommes » est un besoin qui régit la construction de nos sociétés.

 


            La vie intra-utérine se définit comme paradis d’après plusieurs facteurs. Ainsi pour le fœtus le ventre maternel constitue l’intégralité de sa connaissance, il a devant ses yeux son univers au complet. Cette réalité ne lui laisse filtrer que des bribes floues et inconcevables d’une autre réalité : les images et sons qu’il reçoit du monde extérieur. Le fœtus bénéficie de la connaissance absolue de son propre univers, une réalité parallèle lui est donc complètement inconcevable, tout comme le temps ou n’importe quel concept. Cet état de parfaite satisfaction, et d’autosuffisance, par l’absence de connaissance autres, est ce qui fonde la nature paradisiaque de la vie utérine. En l’absence de connaissance, ou en l’occurrence en état de connaissance absolue, le fœtus ne dispose pas de référence, il ne peut de ce fait exprimer le moindre désir. Or le bonheur se définit comme état de satisfaction complet et durable des désirs, ce qui exclut donc la possibilité d’un désir insatisfait. Ainsi la quête du bonheur et le désir de retour au paradis perdu seraient intimement liés.

 


            Un des parallèles, le plus frappant à mes yeux, est celui avec la religion, chrétienne ici (vu qu’elle est la seule en laquelle je dispose de connaissances suffisantes, je ne me permettrais pas de traiter de ce que je ne connais pas). Ainsi on peut voir dans l’expulsion du jardin d’Eden d’Adam et Eve une métaphore de la naissance. En effet il s’agit d’un lieu où tous leurs désirs sont comblés, un lieu auquel ils ont eu le temps de s’habituer, mais aussi un lieu dont ils ont été arrachés aussi brutalement qu’ils y étaient arrivés. Adam et Eve possèdent une connaissance absolue, du fait que tout en dehors du jardin leur est inconnu. Pour eux leur retour est désormais impossible, condamnés qu'ils sont à l’errance terrestre.

 


            C’est à partir de ce point qu’un autre parallèle avec la religion se profile. Privés de connaissances dans cet univers hostile, ils n’ont plus qu’un référent vers lequel se tourner, un être absolu, à la connaissance totale, Dieu. Cette position est très similaire à celle que la mère a sur son enfant. Dans sa vie intra-utérine la mère était l’intégralité de l’univers du fœtus, dans le monde extérieur, après cette violente expulsion qu’est la naissance, elle devient l’unique référent. Enfin, le savoir de l’impossibilité de retour au paradis perdu mène l’Homme à chercher des alternatives à celui-ci, dans la religion, il s’agit du paradis futur, celui qui surgit après la mort. Cet espoir du paradis futur se soustrait à la frustration de l’impossibilité du retour au paradis passé. Ces théories expliqueraient donc en grande partie l’origine de la religion tout en dressant un parallèle antagoniste supplémentaire entre la naissance et la mort.

 


            Trois notions sont fondamentales dans le déroulement de ce processus, celles de liance, déliance et reliance. Chacune d’entre elles correspond à une étape biologique de la procréation. La liance correspond à la fertilisation de l’ovule par le spermatozoïde triomphant. La déliance, elle, correspond à la rupture que constitue la coupe du cordon ombilical. Ici, ce qui nous intéresse est la notion de reliance et l’interrogation concernant les formes qu’elle peut prendre. Dans ce domaine plusieurs pistes valent la peine d’être suivies. Par convenance vous remarquerez que ces exemples ne sont valables que selon le référentiel d’une culture occidentale. La reliance consisterait donc en la recréation d’une forme de liance originelle. Il s’agirait d’user d’artifices, de subterfuges, d’auto-mensonges afin de s’approcher d’une matrice copiant, dans les limites du monde extérieur, le fantasme paradisiaque.

 


            Cette envie, on peut la deviner à travers la structure du mariage : l’homme cherche-t-il à substituer le lien maternel absolu, perdu à travers l’adolescence, par le lien marital ? Ici ma remarque sur le référentiel occidental prend tout son sens en ce que l’on peut m’opposer facilement l’exemple de la polygamie. Contre-exemple auquel je me verrais bien incapable de répondre.

 


            Mais penchons-nous sur un acte bien plus universel, l’acte de pénétration. Serait-il possible qu’il soit l’expression d’une tentative, désespérée, de retour à la vie intra-utérine ? Ou bien ne serait-ce que finalement l’expression du désir de procréer ? N’intellectualisons-nous pas un acte simple qui n’aurait pour seule finalité que la recherche du plaisir ? Il ne m’appartient pas d’exprimer arbitrairement une réponse à cette question.

 

 

            Il reste cependant d’autres questions en suspens, vous remarquerez que je n’ai abordé qu’une approche masculine du désir de regressus ad uterum. Qu’en est-il de l’expression de celui-ci chez la femme ? Cette théorie suppose donc la vision d’une psychologie bien distincte. Je pourrais donc formuler l’hypothèse suivante : il existe une psychologie masculine qui ne peut accepter la perte provoquée par la naissance, elle pousserait donc le mâle à l’utilisation de placebos (dont quelques exemples ont été cités ci-dessus) et le contiendrait dans un état de frustration qui ne serait surmontable qu’à travers la sexualité. En parallèle on pourrait dresser le portrait d’une psychologie féminine qui, elle, serait dans l’acceptation et la résignation face à la terrible perte. Cet état induirait donc un désir de procréation, et ne pourrait-on pas voir, à travers celui-ci, la volonté d’offrir l’opportunité, à son tour, d’expérimenter la vie intra-utérine au fœtus ?

 


            Dali lui perçoit l’expression du désir de retour au paradis perdu dans d’autres éléments que la foi chrétienne, la sexualité ou le mariage. Il nous apporte une vision plus poétique de ce désir. Je vous invite, soit dit en passant, à visionner ses récits de souvenirs de sa vie intra-utérine, daliesques au possible. Pour lui, l’univers artistique ne serait qu’une reproduction artificielle du « paradis prénatal », les fantasmes de l’artiste constituant l’essence de celui-ci en ce qu’ils sont les seules réalités connues lors de la vie intra-utérine, par défaut d’une conscience autre. Il dresse également la comparaison entre ce sacro-saint et la dimension du rêve, en réalisant un parallèle entre la solitude subie au cours de la gestation et celle connue lors du rêve, puisque les protagonistes de ceux-ci ne sont que des autocréations. Au même titre que l’on peut désigner la sexualité comme subterfuge, Dali, lui, désigne comme tel l’art. Il le définit ainsi : il s’agit de transformer ses fantasmes en objet du réel, l’œuvre.  Au cours de ces fameuses interviews (cf. ci-dessus) il fait mention de la sensation de chute dans le sommeil comme rappel du traumatisme de la naissance. Ainsi, pour lui, ce qu’il considère comme le retour au réel après la transe artistique constitue une renaissance.

 


            Bien évidemment ces théories ne sont que des hypothèses de travail, des pistes de réflexions et je ne prétends aucunement pouvoir affirmer  comme vérité les propos ci-dessus. Je ne dispose également pas de la compétence nécessaire pour étayer ces théories de preuves, il est donc important de les traiter en conséquence.

 

 

            Ceci étant dit je vous propose d’étendre le débat. Considérons le cas des prématurés, serait-il possible que cette expérience différente de la vie intra-utérine ait une incidence quelconque sur la psychologie de l’enfant ? Peut-on déceler à travers un traumatisme intra-utérin une explication à l’homosexualité ? Mes amis c’est à vous à vous exprimer.

 


10/02/2014
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